Stage projets CR et photos


Stage "Construire des  projets théâtraux à l'école"

Samedi 19 janvier de 9h à 15h pour les enseignants de primaire et maternelle inscrits aux printemps.
Samedi 19 janvier 16h/22h et dimanche 20 janvier 2013 9h30/16h30 ouvert à tous

Animateur
Bernard Grosjean, comédien et metteur en scène, directeur de la compagnie "Entrées de Jeu", formateur régulier au Nouveau Théâtre d'Angers où il encadre des  stages en direction des enseignants et artistes.

Contenu du stage :
Il s'agira d'aider les enseignants et artistes présents à construire leur projet théâtral avec des jeunes. Bernard Grosjean s'appuiera sur les projets des participants de l'année en cours et donnera à chacun des pistes afin que tous les élèves soient acteurs du projet et que les adultes les aident à passer du jeu à l'art.

Compte-rendu

(9 février 2013, lycée Rousseau Laval)
Stage prévu les 19 et 20 janvier mais reporté à cause des conditions météorologiques ! Vingt stagiaires, 13 pour la première partie (9h/15H) et 7 pour la seconde (16h/20h) ont pu se rendre disponibles. Le printemps lycée se déroulant le même week-end en a empêché un certain nombre d'y participer.

La première partie a regroupé, comme chaque année, des enseignants inscrits au printemps primaire mais débutant le théâtre avec leurs élèves. Bernard Grosjean a donc réaffirmé les principes fondamentaux du théâtre éducation. (à compléter par la lecture de son ouvrage Dramaturgie de l'atelier théâtre, éditions Lansman) surtout par une mise en pratique : chaque groupe passait successivement sur le plateau pour composer des images ou courtes scènes à partir des projets apportés.

Un autre rapport à la classe
La séance de jeu dramatique est une situation qui sort des habitudes de fonctionnement de la vie de la classe. On lance les élèves dans le jeu, alors "ça déborde ou ça congèle !". Les consignes, les repères, la disposition des lieux, tout est différent, ou bien les élèves se défoulent ou alors ils se recroquevillent et n'osent s'aventurer devant leurs camarades. C'est une situation nouvelle aussi pour l'enseignant qui doit lancer le jeu, mais en plus regarder, mémoriser les propositions, les capitaliser pour pouvoir ensuite les reprendre ! C'est pourquoi on commence la séance par une mise en cercle, ça institue la nouvelle activité, ça calme, on est tous dans le cercle, tout le monde s'expose, personne ne peut se cacher ! On commence par expliquer la séance, présenter l'objectif et formuler les règles. Car le théâtre est un jeu et comme tout jeu, il nécessite des règles.
Quelques unes ont été présentées.

Des règles
Il y a les règles qu'on donne mais aussi celles que l'on se donne. La réussite de tout travail est fonction de la préparation effectuée en amont (voir ci-dessous). Pendant les séances, l'adulte face à ses élèves doit pouvoir s'appuyer sur un certain nombre d'aides (V. règles ou appuis de jeu).
L'une d'elles consiste à délimiter les espaces et d'abord l'espace de jeu, limite au-delà de laquelle je suis un autre (adhésif au sol). Ensuite l'espace des coulisses est important pour faire naitre le plaisir des apparitions/disparitions (coulisse des côtés mais aussi coulisse du fond comme les portants dont nous nous sommes servis). Puis il faut prévoir un espace pour les spectateurs car toute la classe n'est pas sur le plateau en même temps et on apprend aussi en regardant les autres jouer (assis par terre ou sur des bancs). Enfin il reste aussi à savoir dans quel espace se place l'animateur qui dirige. Il se met sur le côté, près du comédien quand il y en a un, pour voir l'impact de jeu sur les spectateurs, tout en les surveillant du coin de l'œil.





Autre règle : le tirage au sort des élèves pour constituer les groupes. La composition des groupes change ainsi à chaque consigne, on ne risque pas de voir toujours les mêmes laissés de côté.  Et cela même pour la distribution : on ne peut pas savoir si on peut jouer un personnage si on n'a pas essayé.
Le temps de jeu est limité et court, de 30 secondes à quelques minutes, mais les passages sont nombreux. Pendant le passage des élèves sur le plateau, les réactions des autres, les critiques sont interdites, les commentaires se feront pendant le cercle de parole en fin de séance. Il est préférable d'annoncer aux élèves les différentes phases de travail, en particulier celle où l'on cherche, on invente, on s'amuse… et la phase de répétition ou le travail est plus ardu mais on y trouve aussi un autre plaisir.
Enfin, on commence par jouer, par faire avant d'imposer le texte et de l'apprendre. Il faut d'abord savoir qui on est sur scène et ce que l'on fait avant d'apprendre et de dire le texte. Sinon on risque, selon la formule de Mnouchkine, de faire "de la récitation en costume" !

Le travail en amont
Avant de mettre les élèves au travail, il importe de bien maîtriser le texte, sa structure et pour cela, il faut le séquencer et le titrer, c'est-à-dire énumérer les parties et leur donner un titre qui résume. On peut ensuite indiquer les personnages présents, les espaces, et nommer ce qu'il y a à jouer dans chaque partie. "Jouer, c'est faire, c'est montrer". Cette histoire découpée en tranche peut être affichée sous forme de frise sur les murs de la scène pour que les élèves puissent s'orienter. Le déroulement des séances n'est pas contraint par l'ordre chronologique, on peut commencer par une scène clé pour mettre le groupe en appétit (comme pour le tournage d'un film). Chaque partie est travaillée séparément, sans se soucier au départ d'imaginer les enchaînements. Le travail de soudure viendra facilement ensuite (support musical, rythme d'entrée ou de sortie en fonction de la scène qui suit). Chacun a pris un temps de travail personnel, dans une ambiance très studieuse, pour effectuer le séquençage et le titrage de son histoire. On a constaté qu'on avait tendance à ne pas être suffisamment précis et concret. Il faut se centrer le plus possible sur la tâche à accomplir, trouver des formulations qui renvoient les élèves à des images concrètes, connues. Par exemple, le découpage proposé de l'album La petite poule qui voulait voir la mer était : 1- Le départ du poulailler, 2- L'arrivée à la mer. On a trouvé plus judicieux de détailler davantage pour mieux se concentrer sur une action : 2- le cheminement vers la mer, 3- La découverte de la mer… Un formulation de titres en termes de "comment…" peut faciliter le travail. Ainsi pour Anatole et la petite casserole : Anatole est confronté à de nombreuses difficultés à cause de la casserole attachée à sa jambe : Comment se débarrasser du chien qui le poursuit… Comment monter à  l'échelle… Comment se débarrasser de cette casserole ! Plutôt que "Le choix des abeilles" (La Fleur qui dérange), préférer une phrase plus précise : "Les abeilles cherchent leur pollen dans le coquelicot".
Il faut ensuite préciser dans quel lieu se déroule la scène, par exemple la première scène de L'Or bleu se déroule dans le désert. Il faut imaginer l'espace qui va évoquer ce désert sans forcément le représenter de façon réaliste mais surtout trouver un dispositif (peut-être un tissu jaune) qui va rendre compte aussi de tous les autres lieux en le disposant de différentes façons. Enfin il faut faire la liste des objets, ceux qui sont incontournables.

Des points d'appui ;

Le secret
C'est le nom que l'on donne à  ce point fixe, connu des joueurs seuls, et qui se situe au fond de la salle au-delà des spectateurs (si possible une image qui évoque le spectacle en cours et nourrit l'imaginaire des joueurs). Ce point remplit plusieurs fonctions : il évite au joueur de succomber à la tentation de regarder l'animateur dans les coulisses pour chercher son assentiment, il permet de concentrer, de rassembler le groupe lorsqu'il fonctionne en chœur, il oblige les joueurs à s'ouvrir vers le public et …  lorsqu'on est perdu sur scène, vite regard secret et sourire, ça donne de l'assurance !
On a mis en application le "regard secret". La consigne était simple : chaque groupe  présente successivement un personnage de chaque histoire, les joueurs regardent le secret en choisissant un état correspondant. Par exemple pour l'album Coco, état 1: exaspération, état 2 : jubilation dans la complicité ; pour La Petite poule, 1- amoureuse, 2-angoissée. L'état était communiqué à Bernard qui lançait une musique correspondante. 
Retour, échange après le jeu, chacun peut dire comment il s'est senti. Le temps de jeu est très court, 30 secondes et appuyé par de la musique, un assistant qui donne de l'énergie. Jouer un état dans le silence est angoissant. Sans musique, tout le monde doit donner plus, les joueurs comme l'animateur ! Le séquençage précédent a permis d'identifier précisément ce qu'on doit jouer, des petits éléments l'un après l'autre.




Le théâtre image
"L'immobilité produit de l'intensité", une image fixe est vite spectaculaire. Une première consigne a été expérimentée : constituer une sorte d'image de couverture (ou d'affiche) présentant le personnage de l'album, le regard du personnage accrochant un point fixe situé de préférence en hauteur. Au signal, on se retourne face public. Pour les timides, on peut proposer de jouer à être un géant sur une musique solennelle, grandiose… L'acteur, alors, ne peut pas rester recroquevillé et regarder le bout de ses chaussures !
Ensuite on a procédé à un théâtre statue : A sculpte B qui sculpte A dans une image, une posture de son album. Puis par groupe de 5, au signal chacun se retourne, regarde le secret et reconstruit tout doucement son image. Ensuite, on essaie de mettre en relation les images individuelles pour créer une image collective. On peut chercher ce qu'elles montrent, ce qu'elles disent… On complète les consignes : sortie avec un arrêt juste avant de disparaître, sorte de suspension, regard secret, pour ne pas perdre le personnage, comme cela arrive trop souvent, avant de quitter le plateau.  On précise l'entrée en proposant un registre pour faciliter l'arrivée de l'image (exemple : le défilé militaire).

Une image/une scène
La consigne initiale prévue était de présenter chaque album en cinq images. Beau défi qu'il n'était pas possible de mener à bien faute de temps ! Pour que personne ne soit lésé, il a été demandé de présenter sous forme d'image la première image du spectacle de chacun. On a vu alors une caravane de touaregs traverser le désert, avec turbans et chameau ! (L'Or bleu), les personnages d'un village africain rassemblés sous un baobab (Kouamé et les mile mains invisibles) ou le personnage avec un carton attaché à la jambe, victime des quolibets de ses camarades (Anatole et la petite casserole). Chaque groupe a pu faire une proposition de mise en image pour chaque album, un travail collectif.


Le cercle de parole
L'institution du cercle de parole est une des règles proposées par Bernard pour terminer chaque séance de jeu. Aussi l'a-t-on mis en pratique. Cela permet de faire quelques recentrages, de donner la parole à chacun pour dire son ressenti ou reformuler les problèmes auxquels il est confronté. Quelques points fondamentaux ont alors été résumés. Le spectacle doit être pensé en termes de séquences ou d'images. On voit l'image se construire sur scène puis se figer sur une seule phrase. La musique accentue le climat et transporte ailleurs (mais éviter les musiques trop connues qui imposent déjà leur propre univers). Penser à jouer sur l'alternance entre les scènes ; lent/rapide, léger/lourd… (comme Shakespeare !!). Un même personnage peut être, doit être, joué par plusieurs acteurs, soit sous forme de chœur, soit en relais. Un signe vestimentaire fort suffit à le repérer. Le fonctionnement avec des chœurs est quasi indispensable avec des classes, car un seul élève ne peut tenir le personnage durant toute une pièce, le chœur au contraire conforte l'individu. De toute façon, il n'est pas très pédagogique de laisser un acteur jouer à lui seul un grand rôle, il faut équilibrer la distribution. On peut lui faire jouer successivement le rôle important dans une scène et l'intégrer en tant que membre d'un chœur dans une autre. Enfin, on privilégiera des installations à vue. Les 25 élèves sont installés tous sur le plateau sous les yeux des spectateurs. Cela évite une surveillance toujours délicate dans les coulisses et l'ensemble peut participer au spectacle sous forme d'un grand chœur (bruitage, musique, mouvements collectifs de soutien…). La mise en image peut se faire à vue mais aussi l'habillement (par exemple la mise des turbans dans L'Or bleu). Le jeu est aussi dans les intermédiaires, l'installation des éléments de décor, le entrées et les sorties de l'espace de jeu, les interscènes…
Enfin nous avons retenu la demande de consacrer la totalité d'une prochaine formation au travail de chœur.
M. Le Bihan

Quelques compléments :

Les règles de l'atelier(Dramaturgie de l'atelier théâtre, p. 31/40, titres)
1- Instituer le groupe
                  Cercle de début
                  Le tirage au sort
                  Le minutage
                  Le refus du passage en solitaire
                  La nécessité du travail de groupe
                  Le cercle de parole en fin de séance
                  Le rangement
2- Instituer le cadre de jeu
                  Préparer la salle
                  Définir le cadre de jeu 
3-Instituer l'activité
                  Règles des joueurs
                  Règles des spectateurs
                  Règles de l'animateur

Les appuis de jeu (Dramaturgie de l'atelier théâtre p. 41/58)
                  Le secret, le chœur, l'image, les objets, les rituels, les espaces, la musique……



Les 10 règles de l'atelier théâtre (AMLET N°15 janvier 2003 ! déjà)
1) On a le droit de ne pas jouer, à condition de ne pas déranger le jeu des autres.
2) De même, un groupe n’est pas obligé de jouer, s’il n’est pas parvenu à se mettre d’accord, sachant qu’il a la possibilité d’exposer les sources de son désaccord au grand groupe pour tenter, avec lui, de trouver une solution.
3) On respecte l’expression des autres et on ne fait pas de remarques pendant qu’ils jouent ; on ne se moque pas ; on n’applaudit pas ; on évite de porter des jugements de valeur sur le jeu des autres ou sur soi-même de manière sauvage ; on ne critique pas en terme de " c’est bien " ou " c’est mal ou nul " ; mais à travers des procédures de paroles codifiées, on tente plutôt de comprendre ensemble pourquoi le jeu fonctionne ou pourquoi ça a du mal à jouer.
4) Dans une même séance, on est tour à tour joueur et spectateur : on apprend autant en regardant qu’en jouant.
5) On ne passe jamais seul sur scène ; le jeu se fait systématiquement à plusieurs.
6) La constitution des groupes se fait par tirage au sort systématique, ainsi que l’ordre de passage sur scène.
7) Le temps de jeu est minuté et limité dans le temps.
8) Dès qu’on est sur scène, on est autre et tout intervient sous couvert de la fiction ; interdit donc de s’appeler par son vrai prénom, de désigner un personnage par un nom réel et de…mâcher du chewing-gum !
9) Les postes de jeu sont à tout moment interchangeables et ne sont la propriété de personne ; tout le monde essaie tous les rôles et tous les postes de jeu ; on ne juge pas avant d’avoir essayé. Rien n’est jamais définitif (même le spectacle, soumis à révision après chaque séance) : tout est toujours susceptible d’évoluer ; il faut savoir rester flexible.
10) Les séances commencent et se ponctuent par un cercle de parole et d’écoute. Tout le monde participe à l’organisation matérielle de l’atelier (mise en place et débarras de la salle).